Gestion de l'entreprise

Picasso et l’écoute en management

L’Art peut-il aider un manager à mieux écouter ? Jeudi dernier 19 Mars, nous étions au LaM, le Musée d'art moderne, d'art contemporain et d'art brut de Lille Métropole, à Villeneuve d’Ascq.
#Formation #Reconnaissance
27 mars 2015

L’Art peut-il aider un manager à mieux écouter ? Jeudi dernier 19 Mars, nous étions au LaM, le Musée d'art moderne, d'art contemporain et d'art brut de Lille Métropole, à Villeneuve d’Ascq. Nous y retrouvions les Ateliers du Regard, et c’est sous la conduite bienveillante de Stéphane Coviaux que nous nous sommes plongés dans une toile de Picasso. Une expérience d’abord déroutante, qui s’est révélée de nature à faire réfléchir sur les différents niveaux d’écoute que devrait cultiver tout manager.

Des collections d’exception des XXème et XXIème siècle

A l’orée du parc du Héron, le vaste bâtiment de briques a ouvert en 1983 pour héberger les donations de Roger Dutilleul et Jean Masurel. Il a été par la suite étendu pour accueillir les collections d’art brut de l’association l’Aracine.

Dès la grille extérieure franchie, nous sommes saisis par les perspectives, les statues de Calder, Roulland ou Picasso, et par la nature qui leur fait écrin. Mais pas question de flâner dans le parc… la collection d’Art Moderne qui nous attend.

Car si le LaM est surtout connu pour l’Art Brut et Contemporain, il n’en héberge pas moins des œuvres de Braque, Buffet, Derain, Klee, Fernand Léger, Miró, Vasarely, Modigliani, et Picasso, entre autres. Sans oublier des sculptures comme ce magnifique bronze d’Henri Laurens, L’Amphitryon (1937), qui me fait de l’œil dès mon arrivée ! Nous allons pourtant consacrer l’essentiel de notre attention à une nature morte peinte par Pablo Picasso en 1941.

NDLR : Les droits de reproduction demandés par Picasso Administration étant exorbitants, nous vous invitons à aller voir la toile sur le site du LaM.

Pas vraiment un tableau facile !

Nous y sommes. La consigne est le silence et l’observation. Quinze paires d’yeux plongent dans cette toile au cubisme tardif. Les trois minutes semblent longues. La toile n’est pas exactement une œuvre facile – me serais-je arrêté devant, dans des circonstances différentes ? Je ne crois pas. Des gris, des noirs, des perspectives étranges. A droite, est-ce un drapeau ? Une lampe ? A gauche, que signifie donc ce triangle aigu violet ? C’est une nature morte, d’accord, mais où est la nature - sinon dans ces quatre pommes étrangement vertes ? J’avoue : je n’y comprends rien.

Nous quittons la salle. Chacun exprime après l’autre ce qu’il a vu – toute tentative d’explication ou de rationalisation étant pour l’instant laissée de côté. Voici quelques unes de ces observations :

  • un instrument de musique avec deux baguettes et un anneau – l’instrument, si c’en est un, est posé à l’envers ;
  • la tristesse, l’obscurité, un nœud – un pendu ?
  • la coupe de fruits ;
  • l’aspect rigide – des traits, des pointes, des couleurs froides. Même les courbes paraissent construites en triangle ;
  • une sensation d’enfermement - on cherche la porte depuis le début ;
  • un enchevêtrement compliqué, il y a des reliefs mais on peine à les mettre d’aplomb ;

Observation de ces observations : personne n’a vu la même chose !

On y retourne – la toile s’est éclaircie !

Après l’échange, nous retournons dans la salle devant la même toile. Surprise !

  • Le vert des pommes tire maintenant au jaune ;
  • La disposition apparait plus clairement : le coloré au centre, ainsi que les courbes ;
  • On remarque la lumière, mais aussi la manière de colorer, les coups de pinceau, les différentes densités de matière ;
  • On échange les décryptages : ici un miroir, ou peut-être un mobile. Un vase ;
  • On s’aperçoit des différents moyens d’expression du peintre : les lignes qui courent d’un objet à l’autre, les couleurs, les contrastes, mais aussi la matière, plus ou moins dense et, finalement, la composition ;
  • On note aussi l’encadrement très recherché, qui ouvre le tableau vers l’extérieur au lieu de le contraindre – de l’encadrer…

Nous allons regarder ensuite deux autres toiles du cœur du cubisme (toutes deux de 1909), et prenons plaisir à nous projeter dans le merveilleux tableau de Braque « Le sacré-cœur de Montmartre, 1910 », dont la richesse des tons gris et l’échappée sur les toits de Paris nous font tous vibrer.

L’écoute active en management

Cette soirée nous a offert une manière originale et active d’approche d’une œuvre. On écoute l’œuvre, les autres participants, le conférencier, et aussi… soi-même.

L’expérience est globale, à la fois physique et intellectuelle, intérieure et extérieure. Elle fait appel à une large palette de nos sens : l’écoute, la parole, le regard, le mouvement, la réflexion, l’attention, l’échange… L’écoute elle-même évolue entre le début et la fin de l’expérience : on s’aperçoit que les autres ont quelque chose à dire !

C’est l’occasion pour Stéphane Coviaux de nous rappeller la "théorie U" d’Otto Scharmer. Les 4 niveaux d’écoute : téléchargement, factuelle, empathique, générative, suivent une courbe en U, et il faut accepter de descendre dans les profondeurs de la courbe pour dégager une compréhension réelle et dégager de vraies conclusions. Aller trop vite ne conduit qu’à des solutions toutes faites.

*

Merci à Stéphane Coviaux des Ateliers du Regard. A propos d’écoute active et de motivation, nous vous recommandons de télécharger gratuitement le guide Manager Attitude : La Motivation au Quotidien.