RSE

Combattre le sexisme

74 % des femmes se déclarent victimes du sexisme, mais seulement 18 % estiment que leur entreprise combat cette dérive. Ses conséquences sont aussi nombreuses que fâcheuses. Que peut faire un manager pour lutter contre le sexisme ?
#QVT entreprise #RSE
11 octobre 2017

74 % des femmes se déclarent victimes du sexisme, mais seulement 18 % estiment que leur entreprise combat cette dérive. Ses conséquences sont aussi nombreuses que fâcheuses. Que peut faire un manager pour lutter contre le sexisme ?

D’une simple blague au harcèlement, le sexisme revêt différentes formes et peut être lourd de conséquences. Avec des victimes toujours trop nombreuses, il est temps pour les managers de lutter contre ce fléau.

Le sexisme, ça n’est pas drôle

D’après une enquête (*) menée par le Conseil supérieur de l’égalité professionnelle (CSEP), une grande majorité de femmes (83 %), mais aussi d’hommes (77 %), estiment que le sexisme a des conséquences sur la santé, la perte de confiance en soi (82 % et 75 %), et le bon déroulement du travail (82 % et 75 %). Les femmes ne sont que 3 % à ne pas se sentir affectées au travail. Entre sentiment d’injustice, colère, gêne et humiliation, les femmes sont souvent bien démunies face au sexisme. Sans oublier la souffrance, également bien réelle, des hommes qui ne se reconnaissent pas dans les injonctions de la virilité dominante.

Pour faire face, 81 % des victimes du sexisme ont déjà adopté des stratégies d’évitement : ne pas demander certains postes, ne pas oser demander d’augmentation, ne pas porter certaines tenues vestimentaires, ne pas prendre la parole en public, éviter certains collègues, etc. Limiter les risques d’expositions représente une réaction de protection légitime… mais qui pèse sur les évolutions de carrière des collaboratrices, et sur l’égalité des chances entre hommes et femmes.

Près des deux tiers des victimes du sexisme ne souhaitent pas dénoncer ces comportements, soit parce qu’elles les ont intégrés comme « normaux », soit parce qu’elles craignent des représailles : 43 % d’entre elles ont peur de perdre leur emploi en cas de plainte. Lorsqu’elles rapportent le sexisme dont elles sont victimes, 56 % sont confrontées au scepticisme de leurs supérieurs ou des représentants du personnel, qui mettent en cause la bonne foi de leurs témoignages. Pas très encourageant.

        Lire aussi : Sexisme au travail, une réalité qui a du mal à passer

Que peut faire le manager pour lutter contre le sexisme ?

Le manager ou le dirigeant peut mettre en place des ajustements visant à maintenir l’équilibre entre parentalité et vie professionnelle, qui s’appliqueront aux collaborateurs des deux sexes : horaires aménagés, possibilité de télétravailler, faciliter la prise du congé parental pour le père...

C’est ce que Louise, directrice marketing de produits grand public engagée contre le sexisme, applique à son niveau : « Je manifeste de la vraie joie quand on m’annonce une grossesse. Manager, je donne des augmentations même quand il y a eu des congés maternité. Je ne fais jamais de remarque pour les crèches. J’ai dit à ma directrice produit en retour de congé maternité "cela ne me regarde pas, mais tu fais le 2ème quand tu veux. Aucun problème pour moi" ». A quelqu’un qui lui demande comment elle va faire face à deux congés maternité, elle répond « c’est mon job de gérer ce genre de situation ».

L’entreprise peut également mettre en place une cellule d’écoute, nommer un référent en la matière, compiler les témoignages, faire appel aux représentants du personnel, voire à la médecine du travail. Le kit de lutte contre le sexisme au travail édité par le CSEP donne quelques pistes : « préciser dans les chartes d’éthique ou notes de service de l’entreprise les comportements prohibés relevant du sexisme », « sanctionner les agissements sexistes aux moyens du pouvoir disciplinaire de l’employeur », etc.

Mais ces propositions ne font pas l’unanimité : les hommes interrogés préfèrent la sensibilisation à la sanction, certaines organisations syndicales émettent également des réserves. Pourtant, plus les entreprises combattent le sexisme et adoptent une politique en faveur de l’égalité professionnelle, plus ce type de comportement se raréfie, rendant l’ambiance de travail plus agréable.

Des idées pour gagner contre le sexisme

Voici d’autres exemples de la manière dont Louise, manager, combat le sexisme au travail :

  • Recrutement : « Je recrute des hommes aussi, même si je gère des produits destinés aux femmes ». « J’aimerais pouvoir donner un 80 % (congé parental) à un homme pour montrer l’autre exemple. »
  • Challenger les interlocuteurs sur l’égalité professionnelle : « Je demande au RH, tout fier d’une courbe montrant que les femmes ont de plus en plus de responsabilités, où est la courbe des hommes qui osent demander un 80 % ». A un collaborateur qui lui dit « on est heureux d’avoir une femme à la tête du département, c’est quand même mieux, vu nos produits », elle répond : « Si on suit ta logique on devrait avoir des femmes au Comex ». Pour faire réfléchir.
  • Attitude : « Je ne ris pas aux blagues sexistes. Je serre la main avec beaucoup de fermeté. Je regarde dans les yeux. » Mais elle joue aussi de cette position de femme dans un univers masculin : « je mets une robe rouge qui pète quand je présente ma stratégie devant 30 hommes – toujours classe, jamais vulgaire. »
  • Dans la promotion des produits : « J’essaie de ne pas faire de pub sexiste » même si elle avoue que c’est difficile : « parfois cela pose des dilemmes ; les corps de femmes font encore vendre… »

(*) Enquête menée en 2013 par le Conseil supérieur de l’égalité professionnelle (CSEP) auprès de 15,000 cadres des deux sexes, puis rééditée auprès de collaborateurs non-cadres en 2016.

Pour aller plus loin :

  • Suivre l’hashtag #sexismepasnotregenre sur les réseaux sociaux. Lancé par le ministère, il vise à recueillir des témoignages et sensibiliser sur le thème du sexisme au travail.
  • Rapport du Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes : « Le sexisme dans le monde du travail. Entre déni et réalité », mars 2015.